Voir en premier lieu la description générale de l’Ensemble Episcopal de Terrasa).
San Miguel, située au centre de l’ensemble épiscopal entre Santa María et San Pedro, est l’église la mieux conservée
des trois. En principe on ne peut douter qu’il s’agisse d’un baptistère, à tel point que son premier restaurateur, J. Puig y Cadalfach installa, non sans quelques critiques, la piscine baptismale qui subsiste actuellement, l’originale ayant disparu.
Son image extérieure, avec un intéressant jeu de volumes, qui s’offre à nous comme un ensemble de toits à deux, trois et quatre versants de différente hauteur, nous fait déjà supposer que nous nous trouvons face à un édifice beaucoup plus complexe que les structures de plan basilical de trois nefs et une abside, qui conformaient à
l’origine Santa María et San Pedro. Mais c’est en pénétrant à l’intérieur que nous nous trouvons dans un monde complètement différent. En effet, son ensemble d’arcs, sur huit colonnes avec chapiteaux, formant le carré qui supporte la voûte centrale, entouré des quatre compartiments qui correspondent aux côtés d’une croix grecque, quatre autres dans les angles du carré et l’abside,qui dépasse sur le còté est avec un accès par un grand arc en fer à cheval, ainsi qu’un système complexe de voûtes dans les différents espaces, tout ceci en moins de 100m2, offre l’une des images les plus impressionnantes de l’arc préroman espagnol.
Son plan qui, comme nous l’avons signalé, est en forme de croix grecque inscrite dans un carré, avec une abside exempte orientée vers l’est comme dans les deux autres églises de Tarrasa, est clairement apparenté à ceux de l’ensemble d’églises cruciformes wisigothes, créées par l’importation du modèle de Mausolée de Gala Placidia à Ravenne pour
la construction de San Fructuoso de Montelios, qui, d’après nous, fut suivi dans les églises telles que Santa Comba de Bande, San Pedro de la Mata ou Santa María de Melque et qui continuerait dans des édifices carolingiens comme Germiny-des-Prés, ainsi qu’à Santa María de Lebeña, déjà à l’époque mozarabe, et dans la mosquée du Cristo de la Luz à Tolède, terminée en 999.
Cependant, San Miguel est la seule qui maintienne la structure d’arcs sur des colonnes supportant la voûte centrale que nous pouvons observer à Montelios, bien que, par l’ajout d’annexes dans les angles, le système d’appuis se trouve renforcé, augmentant ainsi la stabilité de l’ensemble. Dans ce cas, au lieu des trois arcs de chaque côté du carré comme à San Fructuoso, il n’y en a que deux par côté, appuyés sur quatre colonnes dans les coins et quatre autres plus minces, l’une au centre de chaque côté du carré. Son système de couverture, dont la structure originale aura sans doute subi des modifications, présente des solutions très intéressantes, étant basé sur quatre voûtes d’arêtes, en brique, dans les quatre bras de la croix, quatre autres voûtes en cul de four, celles-ci construites en pierre, dans les quatre annexes formant les angles du carré de telle sorte que, la partie courbe appuyant sur les murs extérieurs, ils servent à renforcer les supports de la voûte centrale, semi-sphérique sur des trompes, qui dispose de quatre fenêtres, une de chaque côté du cimborium.
Pour compléter la stabilité du système, il y a dans la séparation entre les bras de la croix et les compartiments latéraux huit arcs doubleaux qui, partant des quatre colonnes des angles, s’appuient sur les murs extérieurs, renforcés dans les points de contact par des pilastres à l’intérieur et des contreforts à l’extérieur de l’église. Il faut aussi tenir compte du fait que les arcs qui forment le carré central et supportent la voûte sont en plein cintre surhaussés, contrairement à San Fructuoso oû ils sont en fer à cheval. Malgré cela, San Miguel,aussi bien intérieurement, peut-être à cause de la sensation de légèreté, qu’extérieurement par le jeu de volumes de ses toits, nous rappelle beaucoup plus le mausolée de Montelios que l’art carolingien, en général d’aspect beaucoup plus lourd.
Une mention spéciale pour son abside, à laquelle on accède par un arc légèrement continu en forme de fer à cheval. Elle est située sur le côté oriental, formant un compartiment extérieur au carré, en forme de fer à cheval à l’intérieur,
fort semblable à celui de Santa María. Cependant extérieurement c’est un polygone de huit côtés, fait sans précédent dans l’architecture de l’époque en Espagne, sauf par les restes d’une église wisigothe découverts dans le cloître du monastère de San Cugat del Vallés, de même forme à l’intérieur qu’à l’extérieur, bien que dans ce cas elle soit de cinq côtés, ce qui pourrait être un variante locale de l’époque.
L’édifice disposait de trois portes, une de chaque côté, sauf dans celui de l’abside, et dont il ne reste que celle du côté sud, très modifiée et qui sans doute permettait alors l’accès direct à la nef nord de Santa María.
Un autre thème intéressant à mettre en relief est la présence d’une crypte matyriale
située sous l’abside, à laquelle on accéde par un escalier situé à l’intérieur sur le côté sud. Elle se compose d’un couloir, parallèle au mur est et d’un chevet, perpendiculaire à ce mur, dont le plan est formé de trois lobules en fer à cheval, fort semblable à celui de San Pedro, bien que dans ce cas le problème de la couverture des lobules ait été résolu par une voûte en berceau et que celle du carré central soit plane.
Sur la façade ouest, dans une zone de différent style de construction, de plus mauvaise qualité, nous trouvons une grande fenêtre d’arc en fer à cheval très prononcé, clairement mozarabe, preuve d’une première reconstruction partielle vers le Xème siècle, antérieure à la romane mais qui démontre aussi que l’ensemble original est antérieur à la période mozarabe.
Quant à la décoration, outre les peintures se trouvant dans l’abside, elle ne se voit que dans les chapiteaux du carré intérieur, de type corinthien schématisé et peu homogènes, sans doute d’époque romaine réutilisés, ainsi que les colonnes qui sont de différente épaisseur. Ils supportent l’ensemble d’arcs qui, à leur tour soutiennent les murs de la voûte centrale.
Comme nous pouvons l’observer dans tout cet exposé, San Miguel de Tarrasa est l”un des monuments les plus passionnants,et les plus conflictifs de tout l’Art Préroman Espagnol. Par sa qualité de construction et sa structure, aussi bien extérieure qu’intérieure, il peut se comparer aux meilleurs monuments construits après la décomposition de l’Empire Romain et antérieurs à l’an 900, sans oublier qu’il fait partie d’un ensemble homogène quant à sa planification intégrale et son type de construction initial, utilisant le même appareil, semblable et sans doute de même époque. D’autre part, aussi bien sa structure que ses solutions architectoniques ont en Espagne des antécédents antérieurs au VIIIème siècle, mais se prolongent aussi dans le temps jusqu’a certaines constructions carolingiennes considèrées influencées par l’art wisigoth. Un autre problème se pose quand nous considérons que les trois édifices furent sans cesse l’objet de modifications et d’ajouts depuis leur construction jusqu’au XIIème siècle, qu’aucune étude archéologique couvrant tout l’ensemble n’a été faite,et que nous n’avons que très peu d’informations publiées sur celles qui ont été effectuées partiellement.
Pour toutes ces raisons il est pratiquement impossible d’arriver à une datation définitive, et les seules options possibles seraient de deux sortes: ou leur construction intiale se
serait produite pendant l’apogée de l’évêché d’Egara dans la dernière époque wisigothe, à la fin du VIIème ou début du VIIIème, ou qu’elles aient été édifiées pendant l’établissement de la Marque Hispanique, dans la deuxième moitié du IXème siècle. Par conséquent et bien que ,sans aucune certitude, nous pensions qu’elle pourraient appartenir à l’époque wisigothe, nous nous limiterons à exposer les points que nous considérons comme les plus significatifs pour chacune des deux options:
. En faveur de la thèse wisigothe:
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L’apogée de l’évêché d’Egara représente le moment le plus raisonnable pour construire un important ensemble épiscopal.
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La structure basilicale de trois nefs et une abside et la forme du plan des absides, à Santa María et San Pedro, structure très commune dans l’art paléochrétien et qui continue dans le wisigoth, mais qui disparait pratiquement à partir du VIIIème siècle.
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Le plan cruciforme de San Miguel, avec une voûte centrale à base d’arcs sur des colonnes et des chapiteaux, avec un clair antécédent à San Fructuoso de Montelios, qui donne lieu à une structure centrale beaucoup plus légère que ce qui était habituel dans l’art carolingien.
. En faveur de la thèse carolingienne:
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L’appareil extérieur des trois églises est utilisé pendant la période carolingienne et n’a pas été touvé dans les constructions de période wisigothe qui subsistent encore de nos jours.
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Les arcs en plein cintre qui se trouvent dans l’ensemble, surtout ceux qui supportent la voûte de San Miguel.
Historia de España de Menéndez Pidal: Tomo III
SUMMA ARTIS: Tomo VIII
L’Art Préroman Hispanique: ZODIAQUE
Ars Hispanie: Tomo II
Los Templos Visigótico-Románicos de Tarrasa: F. Torrella Niubó